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19 avril 2015 7 19 /04 /avril /2015 14:58

TÉMOIGNAGE

La photo d'une agression dans le métro racontée

19/08/2011 à 20h25 - mis à jour le 02/09/2011 à 12h11 | vues | réactions

11 mai 1974, vers 17 h 30 à la station Auber dans le métro parisien.

Le directeur de l'agence avait besoin de reportage photo sur l'insécurité dans le réseau de la RATP. Les raisons étaient diverses et non exposées, sinon l'approche de nouvelles élections, mais pour nous, les photographes, cela allait payer. Plusieurs rédactions avaient demandé de la matière sur le sujet et il fallait passer à l'action.

J'ai pris mon Nikon et deux rouleaux de Tri X pour aller à la chasse aux pickpockets dans les couloirs souterrains des transports parisiens. Après six heures d'errance sur les quais et dans les wagons, j'ai entendu des cris et un tumulte à l'ouverture des portes à la station Champs Elysées. Je me suis approché, l'appareil au poing. Des personnes vociféraient. Au milieu du groupe, une Asiatique exhibait son sac à main ouvert et criait qu'on venait de lui voler son portefeuille. Ses amis, dont un parlait un peu le français, demandaient qu'on appelle la police..


Tout près, j'ai tiré plusieurs photos de la victime en gros plan avec son sac Vuitton à la main. Et puis la rame est repartie et j'ai fait d'autres clichés du groupe en leur expliquant qu'ils devaient porter plainte. J'avais mon agression dans la boîte, et je suis allé au labo. Les négatifs n'étaient pas terribles, mais on voyait des visages qui exprimaient en noir et blanc le choc et l'indignation d'une telle situation. Je n'étais pas entièrement satisfait du résultat photographique de cet événement ; ce devait être plus dramatique...

Après une courte nuit, je suis revenu dans le métro. J'y ai passé toute la matinée et une partie de l'après midi jusqu'à repérer un gars en blouson de cuir qui regardait beaucoup les sacs à main des femmes et les portes-documents des hommes. Quand il est descendu du wagon, je l'ai suivi. Il se dirigeait vers la sortie. Et soudain, il a bousculé une personne qui venait vers lui et lui a arraché sa sacoche. Il était à quelques mètres de moi, et avec mon appareil, j'ai pu déclencher de suite. Là, je savais que j'avais une plaque, dans notre jargon, et la "planche contact" a révélé que j'avais trois bon clichés.

Le lendemain matin, tôt, les "vendeurs" sont partis faire la tournée des rédactions parisiennes avec plusieurs clichés de mon agression. Ils ont placé plusieurs fois le reportage sans donner l'exclusivité à personne. Il a été publié dans divers quotidiens et magazines, acheté aussi par TF1 et fait la couverture du Nouvel Observateur.

C'était le 11 Mai 1974, il y a quelques temps...

Et on peut refaire la même chose maintenant. Il suffit juste de savoir qui va payer pour cela : c'est-à-dire mettre l'insécurité sur le devant de l'actualité...

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  • : photojournalisme
  • : photographe de presse fut mon premier métier ; avec l'argentique les photos n'étaient pas retouchées. Elles étaient imprimées en noir et blanc comme à la prise de vue, c'était de vrais documents. Aujourd'hui avec le numérique toutes les photos sont retouchées
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